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Agriculteurs en colère : le risque de la contagion

En France, on n’a pas de pétrole, mais on a du fumier. Et, à la tête du pouvoir comme des forces de l’ordre, personne ne sous-estime l’ampleur que peut prendre une mobilisation paysanne chez le 5e exportateur mondial de produits agricoles. Des Pays-Bas à la Roumanie en passant par la Pologne et l’Allemagne, une partie de l’Europe est secouée depuis des semaines par des manifestations spectaculaires contre des charges financières et des normes environnementales jugées trop lourdes. La contestation atteint désormais la France, où l’autoroute A64 était bloquée depuis jeudi 18 janvier.
Le gouvernement, qui a reporté de « quelques semaines » son projet de loi sur l’agriculture pour tenter de répondre à la colère, est en alerte depuis plusieurs jours. Le chef de l’Etat avait souligné, dès mardi 16 janvier lors de sa conférence de presse, la nécessité d’un « accompagnement de nos agriculteurs pour les aider (…) à améliorer leurs pratiques » face à la transition climatique. Il a de nouveau évoqué le sujet en conseil des ministres le lendemain.
Ministres et préfets ont été appelés à se mobiliser un peu partout sur le territoire. Le ministre de l’économie, Bruno Le Maire, était dans la Marne samedi, pendant que le premier ministre, Gabriel Attal, échangeait « avec des Français » dans le Rhône et que le ministre de l’agriculture, Marc Fesneau, visitait un élevage laitier du Cher.
L’occasion était trop belle pour l’extrême droite, qui s’est empressée d’y voir « un mouvement de colère » contre l’Union européenne, par la bouche du président du Rassemblement national, Jordan Bardella, en visite samedi chez un éleveur laitier de Gironde. Car le jeune patron du RN est aussi en campagne pour les élections européennes du 9 juin. « C’est un de leurs gros sujets et ils vont attiser le feu, leur partition est bien rodée », s’inquiète un ministre, qui sait bien que 30 % du budget européen est destiné à l’agriculture. La droite, elle, « soutient très clairement » le mouvement des agriculteurs, « y compris les blocages » de routes, a affirmé, dimanche, le président des députés Les Républicains, Olivier Marleix, sur France 3.
« Le problème [des agriculteurs], c’est la complexité administrative et la transposition des normes européennes, analyse Patrick Vignal, député Renaissance de l’Hérault, en lisant un courrier reçu du premier vice-président de la fédération départementale des syndicats d’exploitants agricoles. Les prix baissent, les centrales d’achat saignent nos agriculteurs et ils sont noyés sous la paperasse. La situation agricole s’embrase. On arrive aux européennes, il va falloir qu’on règle le problème. » Une analyse résumée par la ministre de l’égalité entre les femmes et les hommes, Aurore Bergé, qui a déclaré, dimanche, sur France Inter : « Les agriculteurs, il faut leur foutre la paix. »
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